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Maria et le narrateur tombent amoureux après la guerre...

Elle me montra d'autres tombes, parmi lesquels celle de Proust. L'élégant jeune homme devenu le prisonnier de la chambre de liège. A l'époque, le grand écrivain reposait dans un caveau de famille mais celui-ci ayant fait l'objet d'attaques et de dégradations, son corps fut transféré dans une tombe individuelle. Elle est celle que le promeneur peut voir aujourd'hui.

Maria, devant le caveau familial, fut aussi prolixe pour Proust qu'elle l'avait été pour Nerval : Je fus éblouie.

Vous allez me dire que je tombais progressivement amoureux d'une jeune fille qui passait sa vie à citer l’œuvre de morts illustres et que grâce à elle, je devins plus érudit ;

C'est ironique, assez drôle mais faux.

Elle ne s'intéressait qu'à certaines tombes, celles de créateurs qu'elle avait aimés et qui l'avaient aidée à surmonter la perte de ses parents et une vie en France qui ne ressemblait pas à sa vie espagnole. A un moment clé de sa vie, elle s'était immergée dans leurs écrits.

Ils lui avaient permis de respirer.

J'admis ses raisons et les crus miennes.

Nous avions respectivement vingt-deux et vingt-cinq ans lors de notre mariage. Bien entendu, j'avais déménagé et lui offris un joli cadre de vie.

 

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Je devins magistrat.

Elle devint décoratrice et se rapprocha de gens de théâtre.

Toutes les semaines, nous marchions dans le cimetière. Nous guettions les dates : celle de notre première rencontre, celle d'un premier janvier où nous avions absurdement voulu nous promener dans le grand cimetière fermé à cette date, celles où ils nous avaient semblé que plus grand chose et surtout plus grand monde ne nous étaient inconnus dans ces lieux et que nous en étions devenus de fins connaisseurs.

Grâce à cette étrange passion que nous avions en commun, il nous fut possible de relativiser la souffrance engendrée par la guerre et les séquelles de celle-ci. Elle avait perdu ses parents qui étaient morts de mort violente. Ma famille s'était dissoute. Elle n'avait ni frère ni sœur et ne voulait pas penser à un voyage en Espagne puisqu'elle était fille de vifs opposants au Franquisme.

En fait, nous étions des rescapés.

Je dirais même plus : des rescapés un peu coupables de l'être.

Nous n'avions pas été arrêtés pour fait de résistance.

Nous n'avions pas eu la chance de ne pas revenir du front.