Agnès a fait l'expérience du mal dans une villa provençale mais un voyage en Hongrie a fait d'elle autre femme. De retour dans cette propriété qui fut pour elle un lieu de plaisir, on la sommes de devenir mauvaise. Elle asservirait, elle battrait. Mais Agnès ne veut pas humilier, elle veut racheter ce qui peut l'être...
Je ne mis à lancer des propositions de rachat de victimes en augmentant les sommes et ceci, quand je me trouvais face à mes bourreaux. Bien sûr, ils riaient et continuaient leurs sévices sur moi comme sur d'autres mais je restais stoïque au fond tout en souffrant beaucoup physiquement et moralement...Pendant cette étrange période, je n'eus plus de relations personnelles avec quiconque sauf avec cet Italien qui restait parfois assis sur mon lit au delà de ce qui était permis. Lui qui était depuis très longtemps donné au mal pouvait-il être touché par l'horreur de sa conduite et l'ignominie de celle des autres ? Cela peut paraître naïf mais j'y croyais...
-Tu ne veux vraiment pas dresser ?
-Non.
-Il suffit juste qu'ils se laissent baiser. Rien de sorcier.
-Non.
-Quelques coups de canes, de fouet, de cravaches ! Enfin, Agnès, tu vois bien qu'on ne les abîme pas tant que cela ! Il faut bien qu'ils nous servent !
-Non.
-En bas, tu sais...
-N'insiste pas, je veux y aller...
-Mais les racheter ! Pourquoi ? Pourquoi tu veux faire ça ?
-Ne peux-tu pas comprendre du tout ?
-Non.
-Je crois que si mais ça changerait trop la donne pour toi...
Et je ne me trompais pas, il le savait. Seulement il était très servile et étouffait vite en lui ces éclats d'humanité qu'il avait parfois...Il essayait encore de me montrer sa méchanceté, pourtant :
-Moi, être bon ? Souviens-toi de ce cierge que je t'avais donné...Je ne pouvais pas savoir que tu serais aussi bien accueillie à ton arrivée en Hongrie, je t'assure , sinon, tu n'aurais pas fait tout ça...
Pourquoi pensais-je qu'un lien secret existait entre nous, loin de toute cette saleté ? Je savais que je ne faisais pas erreur et sachant qu'il ne changerait pas, j'espérais être la seule à saisir cette étincelle...
J'insistais, je tempêtais et on finit tout de même par me donner raison. Je découvris, en bas, de pauvres êtres qui achevaient de se décrépir. Alors qu'en haut, on avait attiré des jeunes sans famille avec un peu d'argent avant de les malmener, ici, c'en état fini d'eux. A ce que j'avais compris, on laisserait filer au bout d'un moment les jeunes gens dont on avait fait des esclaves sexuels mais on le leur aurait si peur qu'ils ne se plaindraient jamais ni ne demanderaient de dédommagement. Personne de toute façon ne les soutiendrait jamais. Ici, on avait parqué dans de grandes cages de pauvres candidats à une vie meilleure qui étaient arrivés par camion ou par bateau. On les avait d'ailleurs honnêtement accueillis au nom de je ne sais quelle association humanitaire puis après avoir endormi leur vigilance, on les avait conduit ici, non sans leur avoir dérobé leurs papiers, s'ils s'en avaient et leur argent. Ils n'étaient personne et comme me l'avait dit Fiastre, une fois qu'on aurait trouvé leur cadavre, souvent à quelques centaines de kilomètres de là, ce serait un casse tête de les identifier et de savoir qui les avait tués. Il y avait là trois pauvres Marocains, un Éthiopien, deux Ivoiriens, deux femmes tziganes, une Roumaine et quatre Algériens, deux hommes et deux femmes...Tous étaient dénutris et marqués de coup.
Me voyant arriver, Fiastre, que je n'avais vu en haut, s'esclaffa.
-Donnelle ! Pas désireuse de faire ta mère maquerelle ? Tu préfères être à poil dans une cave, on dirait. Je leur demande de bien t'accueillir ?
Je pouvais lui cracher à la figure mais j'avais mieux à faire. Extirper de là ces malheureux. Je me mis donc à le haranguer, comme déjà je l'avais fait. De nouveau, il me regarda avec amusement et de nouveau, il refusa. La donne avait monté pourtant.
-En tout cas, Donnelle, tu as du cran ! Ah, que je t'explique...Je ne passe pas ma vie ici, ça pue trop. J'ai un fidèle lieutenant qui me seconde. D'ailleurs je vais te le présenter.
Un homme encore jeune, à la figure patibulaire, s'approcha.
-Andràs Kun...