Quand je devenu agent du gouvernement soviétique, j'ai été heureux. On ne m'enfermait plus dans un carcan où on vous donnait d'avance une méthode pour penser et pour aimer. Philby a dit de moi que j'étais « un camarade extrêmement bien éduqué, avec des relations sociales précieuses et les inclinations d'un aventurier". J'ai reçu le nom de code "Mädchen", signifiant "Girl", plus tard changé en "Hicks". Si je ne m'abuse, le premier se référait à mes attirances amoureuses et sexuelles et le second au fait que j'étais un peu péquenot et paumé. Dans les deux cas, ça me convenait. Je n'avais pas oublié les coups de canne. On nous a adjoint d'autres recrutés et au total, nous avons été cinq. Cinq espions. J'ai commencé mon travail, servant un député conservateur qui adorait l'Allemagne nazie. Adoptant son engouement, j'ai fait avec lui des voyages en Allemagne. Il fallait bien donner le change. J'ai ensuite travaillé pour la BBC où toutes sortes d'informations me sont tombées sous la main. Je passe sur les détails et en reviens à ma notion des frontières. Les années passants, il était évident que la guerre éclaterait et que les limites de nos différents pays ne seraient plus les mêmes. Il fallait choisir son camp pour redéfinir les contours d'un autre mode et il fallait aussi accepter d'être double ; Je servais les instances soviétiques mais nul ne l'avait découvert. Après tout, j'étais un Anglais bien éduqué et très snob dont le MI6 avait sollicité les services. J'avais rencontré Churchill et plus tardivement Neville Chamberlain le Français Edouard Daladier. A l'approche du conflit, j'ai recueilli les opinions de dirigeants britanniques. Ils pensaient qu'à elle seule, la Grande-Bretagne pouvait vaincre l'Allemagne. Je ne voudrais pas me vanter mais c'est sur la base d'informations de ce type que l'Union soviétique a pactisé avec Hitler. Quid des frontières présentes et à venir ? Mais, elle a éclaté, cette guerre et j'ai servi le MI6 et le MI5, son homologue intérieur sans que quiconque ne se rende compte que j'étais un agent double. Je vivais, à vrai dire, dans une grande peur d'être démasqué mais on estimait au contraire que j'étais loyal. Et puis, les aléas de la guerre ont atteint leur but. Hitler envahissant, le Royaume Uni est devenu allié avec cet empire qui l'avait toisé. Drôle de revirement. Du coup, j'ai travaillé de nouveau à la BBC, reçu des hommes politiques, enquêté discrètement et transmis ce que je savais.