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LE SOLEIL MEME LA NUIT. FRANCE ELLE.
30 mars 2023

Sœur des Anges. Partie 1. Chantal Larroque-Daubigny et Agnès.

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Je reçus un coup de fil :

- Agnès Donnelle ?

-Oui, c’est moi.

-Chantal Larroque-Daubigny à l’appareil. Vous avez répondu à l'annonce que j'ai fait paraître dans l'Express.

C'est vrai, j'avais repéré cette annonce et y avais répondu.

-Oui, en effet.

La voix, au boit du fil était exigeante.

-Une maison de maître dans le Lubéron. Vous en seriez l’intendante pendant deux mois. Ce que vous m’avez écrit me laisse à penser que vous êtes la candidate idéale. Vous êtes une femme mature, posée, réfléchie et vous avez du sang-froid.

-Merci. Mais vous savez, j'enseignais les lettres jusqu'il y a peu. Je suis loin d'avoir les compétences que d'autres doivent avoir.

-Ne vous inquiétez pas de cela. Vous aurez une période de formation.

Et je devrais ?

-Eh bien voilà. Cette grande demeure dispose d’un gardien et de deux jardiniers également aptes à faire des travaux d’intérieur. Ils sont habiles, vous savez. Le propriétaire de la maison est un homme âgé qui ne peut malheureusement plus y séjourner. Je suis sa parente par alliance. Voyez-vous, il faut le maintenir dans l’idée que cette maison qu’il adore n’est pas condamnée. Il y reste une forme de vie. Elle est assez isolée mais le site est exceptionnel et vous serez ravie d’y séjourner. Elle a belle allure et son aménagement, de type provençal, est somptueux. Je lui ai dit que vous cherchiez, pour écrire votre premier roman, un lieu qui exacerbe les passions tout autant qu’une demeure silencieuse qui vous pousse à l’effort. Quoi de mieux pour l’écrivain que vous allez devenir que ce lieu plein d’ombres et de lumières, de sainteté et de supplices !

-Ce sont-là les commentaires qui me surprennent ! Iriez-vous dire à ce vieil homme qui possède cette maison que je vais livrer de grands combats ? Ce serait le déconcerter et le bercer d’illusions ! Quant à écrire un roman…

-Il connaît bien cette demeure même s’il ne l’habite plus.

-Peut-être mais je n’y serais qu’une gardienne et je vous avoue en être ravie.

-Une gardienne, non. Vous serez leur hôtesse...La maison sera pleine : il faudra la faire vivre.

-Les photos jointes à l’annonce me rendent fébriles. Cette vaste maison de maître comme il n’en existe que dans le grand sud, ces cyprès et cette colline...Il y a là un équilibre, une douceur !

La voix restait un peu hautaine. Elle était sifflante parfois. A la réflexion, elle était plus intimidante que bienveillante mais tout paraissait si irréel.

-Vous ne trouverez pas tant de douceur dans ce labyrinthe des passions !

-Je vous demande pardon ?

-Les échelles de la purification et celles de la noirceur ...

- Allo…Je ne comprends pas !

-C’est sans importance pour l’instant. En arrivant, vous penserez à Jean Giono et à d’autres auteurs méridionaux, bien sûr. De toute façon, la bibliothèque de la villa est très vaste. Votre inspirations naîtra…

-J’écrirai ?

-Mais oui ! Vous ne serez pas qu’une hôtesse car il ne le veut pas ainsi. Vous aurez envie que des lieux si beaux s’animent.

-J’écrirai vraiment ?

-Oui. C’est là une façon de rendre vivants ces pièces, ces couloirs, ce jardin…Vous y ferez évoluer des êtres de votre invention. Et pour ne pas que ce soit un séjour trop austère, vous recevrez quelques visites. Mon parent a une longue descendance et il lui reste tant d’amis ! Quant à vous, il est bien évident qu’à condition que vous ne logiez personne pour l’été, vous pouvez recevoir.

- Bien, nous nous rencontrerons pour finaliser tout cela et nous…

-Non, vous signerez le contrat que je vous fais parvenir. Il comporte sa signature. Je vous enverrai un billet d’avion, un formulaire pour une location de voiture ainsi qu’un récapitulatif des tâches à accomplir ou à faire accomplir dans la villa. Tout ce que vous aurez besoin de savoir, Matteo, le plus sérieux des employés, vous le dira. Arrivée à bon port, il faudra retourner le véhicule de location car vous disposerez d’un break. Les commerçants, les entreprises, le médecin, il vous dira tout. Il est très aidant. Vous ne serez pas prise au dépourvu.

-Donc, je ne vous verrai pas…

-Ah mais si, en août, je passerai peut-être...

Je restais, malgré ma surprise, sur une impression positive et n’eus bientôt plus de cesse de recevoir mon contrat. Compte tenu que j’étais déjà salariée, je n’étais pas dans la posture d’une demandeuse d’emploi. Il s’agissait autant pour moi de saisir au vol l’occasion de vivre une expérience nouvelle que pour madame Larroque-Daubigny d’employer de façon ponctuelle une personne qui lui semblait digne de l’être. Chacun y trouvait son compte et sans savoir qui elle était réellement, je décidai qu’elle me trouvait aimable au sens propre et aimante. N’ayant jamais réussi à combiner l’un et l’autre, j’en fus ravie.

 

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